Il ne faut pas nécessairement tirer beaucoup de gloire d'avoir prédit que la 46ème nuit des César serait une abomination. Ah ça, on devait voir ce que l'on allait voir, faisant table rase d'un passé honteux qui consacrait des cinéastes nauséabonds et ouvrant la voie du nouvel esprit Canal [pour autant qu'il convienne à sa sainteté Bolloré]. On a vu ...
Si l'on résume le naufrage de la soirée à celui du Titanic parce que Corinne Masiero s'est dénudée sur la scène pour figurer [avec la nuance que l'on lui connait], on passe à côté de beaucoup, et probablement de l'essentiel. Certes, la grosse ficelle d’apparaître sur scène a encore été jouée comme si l'on était encore dans les années 80 où Canal+ jouait la subversive en forçant De Caunes ou d'autres à apparaître les fesses à l'air. D'ailleurs, celui qui s'affligea du geste de Masiero et de la honte en découlant a d'ailleurs commencé sa carrière ainsi en se baladant à poil sur les plateaux de Comédie mais Cyril Hanouna n'a pas seulement la mémoire courte, l'intégrité aussi. Bref ...
En regardant la longue cérémonie de vendredi, je me suis rappelé du précepte qu'on ignore toujours trop en télévision : l'image, c'est l'audience de demain. A ce rythme, je ne parierai pas une carte UGC illimité sur l'avenir de la manifestation. D'ailleurs, on a été exaucé par avance ... l'audience de vendredi est la pire depuis dix ans : 1,64 million de téléspectateurs et 9,1% des 4 ans et plus jusqu'à 0h40. L'année dernière, il y avait encore 2,16 millions de téléspectateurs. 500.000 personnes ont préféré ne pas s'infliger les blagues éculées [à base de trois "bite", deux "couilles" et un "merde" tellement convenus] d'une Marina Foïs en perdition et à bottines moches, les suppliques militantes confinant à l'obsession qui ne font que renforcer le sentiment d'entre-soi convenu, les flops tombant comme les feuilles mortes à l'automne ou encore les artifices paresseux d'une production Canal qui s'approche chaque année davantage de l'AVC créatif irrécupérable sinon fatal.
Que Corinne Masiero croit utile de se dévêtir pour expliquer que les intermittents du spectacle sont bientôt autant dépouillés que cela, c'est déjà prendre à témoin une France qui, elle-même, souffre et compte davantage de chômeurs qui n'ont pas forcément reçu toutes les facilités des professionnels de la profession. En cela, l'indécence n'est pas dans la tenue de l'actrice de "Capitaine Marleau", mais dans la posture. Au surplus, cette année il n'y avait pas Polanski pour fédérer, faire converger ou justifier d'un éclat de voix. Rien ... pas une cause autre que celle de demander à Roselyne Bachelor de rouvrir les cinémas parce que c'est comme ça, qu'importe si les signes d'une troisième vague pointent et appelleraient à davantage de prudence. Pour un peu, là où le printemps 2020 avait fait émerger des joggueurs de partout, là où l'automne 2020 avait souligné à quel point les français lisent tant puisqu'ils étaient prêts à s'immoler pour faire rouvrir des librairies qu'ils désertent pourtant depuis tant d'années, voilà donc que la cause nationale ce sont désormais les cinémas ... comme le disent les happy-fews de vendredi soir dernier, tout pénétrés de leurs intérêts germanopratins aux confins des caricatures les plus outrancières [mais hélas bien en deçà de la réalité]. Ah si si, ne soyons pas injuste : il y avait encore les scories de l'an passé avec un acteur noir qui vient parler des acteurs noirs, Jeanne Balibar qui en fait des tonnes sur le problème des actrices de plus de 40 ans pour trouver des rôles ... à quand Passe-Partout qui revendique un ascenseur plutôt que les marches du Fort Boyard, ou Gad Elmaleh pour légaliser le plagiat. De vraies causes tu vois ...
Pourtant ... ce n'est pas ce qui manquait vendredi soir. Certes, la crise sanitaire mais quid du licenciement d'un comédien de Canal+ au motif qu'il a osé singer le petit Praud-cureur de Cnews [propriété de Canal+ qui diffusait la soirée], sur ordre de Bollo Ier, roi de Canal+ ? Quid des discussions, que l'on avait connu jadis plus virulentes lorsqu'il s'agissait de remettre en cause la fameuse exception culturelle, au sujet du financement du cinéma par Canal+ initiées par le roitelet Maxime Saada, affidé de Bollo Ier et qui a déjà fait les poches au football ? Alors qu'il y aurait tant de vannes à faire et d'esprit à faire jaillir, curieusement, ni Marina Foïs ni l'un quelconque des remettants [certains étant clairement hagards, d'autres assumant farouchement de pactiser] n'a trouvé le courage ni la force d'y faire même allusion ... Ah ça, pour dénoncer le confinement, on en trouve du monde mais quand il s'agit de piquer rien qu'un peu la main bolloréenne qui les nourrit, il n'y a curieusement plus personne ... un vol de moineaux en bonne et due forme.
"En revanche, pas un mot, pas une allusion, pas une évocation du grand argentier du cinéma français, du propriétaire de Canal+. Aucun Che Guevara en smoking pour dénoncer le licenciement du comédien Sébastien Thoen, ni celui d'ailleurs de tous ceux qui au sein du groupe ont eu le courage de le défendre. Aucune égérie en Chanel pour s'inquiéter du bras de fer entre Bolloré et les sociétés d'auteurs. Personne ! (..) Et vous savez pourquoi ? Parce que sous les strass et les paillettes, nos révolutionnaires de gala savent parfaitement faire la différence entre ceux devant qui on se lève et on se casse, et celui devant qui tout le monde reste assis en silence. Que vaut la liberté de dire tout et n'importe quoi quand on ne défend pas celle de Sébastien Thoen à railler le populisme morbide d'un Pascal Praud ? Comment peut-on vouloir être essentiel aux autres quand on ne parle que de soi, de sa souffrance et de celle des siens, au beau milieu d'une pandémie ? Ce vendredi, jamais le cinéma français n'aura été à ce point une industrie de divertissement à la solde de celui qui la finance, animée par quelques happy few, venant se rebeller en famille dans la main de Bolloré. Tout ça pour vous dire qu'à moi aussi vendredi soir, le cinéma français m'a beaucoup manqué". Sophia Aram, sur France-Inter, n'a jamais eu de mots aussi justes pour expliquer à quel point l'on se sentait si peu concerné par le délire névrotique de vendredi soir, où chacun essayait de rassurer encore en se disant que la soupe serait encore bonne, malgré le fait que l'épice Bolloré est un peu trop amère mais surtout il ne faut pas le dire, cela pourrait justifier qu'il y en ait moins dans l'assiette le coup d'après. A côté, les mères tenant à bout de bras les familles monoparentales qui ont du mal à joindre les deux bouts en cumulant ce qu'elles peuvent trouver de petits boulots en ce moment ou les chômeurs en fin de droits qui voient bien que la crise va être un sacré coup de pelle dans la gueule ne pouvaient que rester perplexes voire sidérés devant tant d'indécence.
Finalement, cette nouvelle page de l'histoire des César donne déjà envie de la tourner vite pour, espérons-le, revenir un jour à davantage de mesure ou même simplement de conscience d'autrui [pas seulement quand il s'agit de feindre, affecté(e), d'embrasser les vrais problèmes d'un monde auquel la démonstration a été faite vendredi qu'il n’appartiennent plus]. Oui, on veut le retour des figures d'antan qui se gardaient de croire que le succès ou la notoriété qui était la leur ne les autorisait pas à faire preuve d'une telle impudence, d'une si redoutable impolitesse ... d'une évidente vulgarité nombriliste. Marina pourra toujours continuer à rigoler du bout des commissures de ses blagues écrites par des auteurs tant dyspnéiques qu'on y voit l'évidence d'un symptôme Covid-19. Le monde d'avant [où l'on allait au cinéma, au restaurant et autres] n'avait pas que du mauvais : la preuve, les César y étaient regardables et on y passait même un agréable moment en se remémorant des émotions passées dans les salles obscures. Vendredi soir, j'ai compris une chose : au delà du "cinéma français", c'est toute la clique Canal+ qui est à vomir et fait presque figurer les valeurs de TF1 pour acceptables. Cette répugnance n'est pas de circonstance : elle est profonde et contamine tout au point qu'il faille envisager autant de gestes barrières que de nécessaire pour laisser de telles infections là où elles sont, elles finiront bien par mourir d'elles-mêmes. Vincent Bolloré a déjà mis à son agenda de passer le cinéma français à la diète ... les imbéciles de vendredi soir dernier ne l'ont pas encore compris ou se sont tus comme pour expier l'inévitable. En somme, le film qui a remporté le plsu de trophées portait lui-même le message : "Adieu les cons".
Tto, qui n'en revient pas
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