Douloureusement et avec fracas, mais elle se tourne la page Trump avec autant de discrétion et de retentissement qu'il y a quatre ans lorsque le monde, stupéfait, vit arriver l'homme d'affaires perclus de quatre faillites personnelles à la tête de la première puissance du monde. "Il ne fera pas ce qu'il a promis" disaient alors les rationnalistes considérant que les institutions le rattraperaient et que la machine le digérerait. Dès les premières semaines, on a bien compris que le monde allait dérouiller, au gré des incartades et tweets rageurs de celui qui passe du orange au rouge à la Maison Blanche.
Loin de vouloir dresser le bilan de Trump [tout n'étant pas à jeter], le constat est sans appel : à l'instar de ses affaires personnelles qui ne tiennent que par la monétisation de son nom dont il a fait une marque [c'est d'ailleurs ce qu'il refuse obstinément de céder en tout ou partie à l'occasion de chaque faillite], il laisse une situation bien pire que celle qu'il a trouvée et un monde moins équilibré qu'il ne l'était auparavant [ce qui n'était pas si simple déjà].
Finalement, Donald Trump accomplit aujourd'hui la dernière journée de son mandat et l'on se demande bien à quoi à rimer tout cela, ni pourquoi tant de personnalités pas forcément radicalisées l'ont suivi dans cette aventure. C'est d'ailleurs le propre de tout effondrement de système autocratique, populiste ou même autoritaire : une fois terminé, on en vient à ne pas comprendre ce qui a pu guider celles et ceux qui l'ont alimenté, ne voyant pas l'impasse dans laquelle ils étaient. Quand tout repose sur la force et une dictature, on comprend bien que le ciment repose sur la répression et l'injustice. Mais là, dans ce que l'on a coutume d'appeler la plus grande démocratie du monde avec une constitution séculaire qui garantit des droits incompatibles avec les dérives personnelles, on se demande bien comment le dessein poursuivi a pu être crédible considérant que les échéances électorales sont sinon plus fréquentes en tout cas régulières. Dès lors, on entend mieux la démarche du Président consistant à discréditer le processus électoral et fanatiser ses troupes au point qu'elles se sont crues légitimes à envahir le symbole démocratique du pays qu'ils croyaient défendre en protégeant celui qui n'a eu de cesse que de fouler aux pieds les règles établies.
Le fameux "check and balance" a souffert. Cet équilibre des forces garantissant l'absence de dérives devra être restauré et, probablement, faudra-t-il trouver de nouveaux gardes-fous à l'instar de celui qui interdit désormais à un Président de se représenter plus d'une fois pour ce mandat.
On ignore encore si Trump est déficient mental ou s'il est le Machiavel inconséquent du monde moderne en dessinant, au gré de ses impulsions plus ou moins calculées, les contours d'une sphère d'influence des Etats-Unis. Le plus vertigineux est qu'il a envisagé plusieurs fois de faire imploser l'OTAN, jeter à la poubelle les fondements du nouvel ordre mondial hérité de la Seconde Guerre Mondiale et qu'il a délégitimé toutes les voies du multilatéralisme au profit de deals plus ou moins consistants [le meilleur exemple étant celui avec la Corée du Nord où il se targue d'avoir fait avancer les choses et où il s'est fait rouler dans la farine puisqu'il n'a rien obtenu d'autre que de nouvelles menaces, dernièrement, du dictateur de Pyongyang]. En heurtant tous les alliés traditionnels de l'Amérique et en faisant les yeux doux à Vladimir Poutine et autres grands démocrates, Donald Trump a finalement affaibli son pays, alors qu'il explique l'avoir renforcé.
C'est d'ailleurs le seul héritage funeste qu'il peut réellement revendiquer : avoir rendu acceptable le concept de vérité alternative, comme si ce qui est blanc pouvait aussi être noir selon l'intérêt de celui/celle qui en a besoin. Du coup, les "fake news" alléguées alors que les faits sont têtus ont rendu, avec la complicité de certains médias et des réseaux sociaux, la ré-émergence d'idées pestilentielles dont on aurait condamné l'auteur il y a seulement dix ans. Aujourd'hui, des supérémacistes blancs n'ont plus honte d'afficher des positions raciales sidérantes, peuvent à la télévision expliquer qu'il y a une hiérarchie des races et même être considérés comme des gens bien de la bouche même du Président des Etats-Unis. Le renversement des valeurs et le retour de groupes fièrs d'un passé esclavagiste et ségrégationniste donne le vertige mais on a excité le taureau depuis quatre ans avec autant de chiffons rouges que de nécessaire, pour faire diversion et cimenter un électorat qui s'est révélé, heureusement, moins décisif que celui qui a permis à Joe Biden de l'emporter à la régulière en dépit de ce que les néofascistes de tous bords expliquent encore, y compris en France [pour continuer à se faire un peu de notoriété en faisant un buzz plus pitoyable que convaincant].
Le 6 janvier dernier restera, dans l'histoire, la tâche indélébile d'une tentative d'intimidation, de délire collectif et négation des institutions de la part d'un Président isolé, aux abois et soucieux de faire de l'image tandis que cinq personnes se faisaient tuer. Le 6 janvier dernier est un triste résumé de la présidence Trump : en improvisation, en foucades et ruades mal maîtrisées, en duplicité et en réécriture des faits, en vérités alternatives pour semer le trouble sinon le chaos. Au delà du désordre que l'on pouvait espérer n'petre que disruptif pour installer un nouveau paradigme, Donald Trump aura agi à court terme, joué sur les émotions en hystérisant la société, en faisant de l'image avec un mur pour faire oublier qu'il avait promis de grands travaux d'infrastructures qu'il n'a jamais commencé à décider ... l'imposture est totale et l'on est presque dans le même état de sidération que lui lorsqu'il a réalisé qu'il allait devoir être président. Sauf que maintenant, Donald va aller dorer sa graisse à Mar-a-Lago tandis que le monde essayera de se remettre de ses inconséquences et mensonges. On n'est pas traîné pour destitution deux fois en un an impunément ... Trump n'est pas donc pas le président du désordre, c'est celui du chaos.
Tto, qui n'est pas mécontent que l'on s'en débarasse
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