Lorsque le soleil lèche de ses rayons les murs de Paris en ce 24 août 1572, l'ambiance déjà particulière des derniers jours a considérablement empiré et la nuit a confiné à l'enfer. Celles et ceux qui voulaient dormir paisiblement n'y sont évidemment pas parvenu, le premier acte d'une tuerie de masse autorisée par le roi a eu lieu et a décimé tous les chefs protestants se trouvant dans la capitale. On comprend leur incrédulité qui est pourtant rapidement pulvérisée à mesure qu'ils constatent les stigmates de telles exactions dans les rues, sur les murs, du fait de traces de sang, de membres traînant ici et là qui convoquent des mouches par une chaleur déjà notable alors qu'il n'est pas neuf heures du matin. Oui, Paris s'st ensanglantée parce qu'il fallait trouver une issue au roi, coincé dans une synthèse impossible pour servir le dessein de Catherine de M2dicis qui croyait pouvoir sceller la réconciliation de deux camps qui ont chacun juré la perte de l'autre depuis près d'une dizaine d'années au motif qu'ils ne pratiquent pas la même religion bien qu'ils soient tout de même chacun chrétiens.
Alors que l'exécution des dignitaires huguenots était devenue inévitable, le duc de Guise à qui l'on a remis les pouvoirs d'y procéder n'y est pas allé de main morte. Si la nuit devait permettre de prendre par surprise les chefs rivaux, le zèle conduit en massacre généralisé de tous les protestants, sans considération d'âge, de sexe ou de rang social dès la nuit. Dès lors, difficile de dormir dans une telle ambiance de carnage qui permet aux parisiens les plus exaltés de se laisser emporter par la peur et la violence quand il ne s'agit pas du pure sauvagerie. Les troubles sont forcément le fait des protestants qui, terrorisés, essayent de survivre et, par réaction, les catholiques se mettent à les poursuivre, pensant agir pour la défense de leur ville. D'ailleurs, c'est parce que beaucoup ont cru que la ville était en danger, les portes ayant été fermées, que le tocsin a sonné à la cloche de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, proche du Louvre, tocsin rapidement repris par d'autres clochers de la ville. Oui vraiment, comment était-il possible de dormir cette nuit là ? Parce que c'est d'une épuration qu'il est question.
Partout, les catholiques décident de supprimer toute personne relevant de la réforme, comme un affront à sa propre religion. Partout, la violence est extrême et le pouvoir royal laisse faire parce que la situation est hors de contrôle. Nous sommes à une époque où il n'y a pas d'armée permanente, seul le prévôt des marchands est en mesure de lever un régiment de milice dans chacune des douze paroisses de Paris soit une compagnie par quartier. Le roi ? Il utilise surtout des mercenaires qu'il paye.
Mais qu'importe, les croisés sont persuadées d'être dans le droit chemin : une aubépine a fleuri en ce matin du 24 août 1572 dans le cimetière des Innocents, c'est donc un signe divin qui renforce la conviction du peuple. Cette épuration est bien validée par les puissances du ciel.
L'ivresse de violence n'a plus de limite : la dépouille mortelle de Coligny est livrée à la populace, la tête portée au roi, puis embaumée et envoyée au Pape qui jubile et fait même frapper médaille commémorative pour l'occasion. A Paris, le cadavre de Coligny est traîné pendant trois jours dans les rues de Paris, et même retiré d'entre les mains des enfants pour être finalement pendu à Montfaucon derrière l'actuel l'hôpital Saint-Louis.
Le délire est tel qu'on raconte même dans les rues que Charles IX lui-même se donne le plaisir de jouir de ce spectacle apocalyptique parce qu'il a fini par croire à une conspiration protestante imminente de laquelle il a réussi à échapper. Il faut dire que le souvenir familial de la conjuration d'Amboise ayant touché son grand frère auquel il a succédé est tenace ...
N'empêche, le massacre va durer ... et au delà de ce que le roi trouve supportable. En effet, une fois l'amusement du début lié certainement au soulagement d'avoir échappé à une nouvelle conjuration, Charles IX trouve que cela devient un peu pénible surtout lorsqu'il envisage la couleur de l'eau de la Seine depuis ses fenêtres ... enfermés dans la ville quadrillée par la milice bourgeoise, les protestants ont tellement peu de chance d'en réchapper qu'ils se font laminer. Leurs maisons sont pillées et leurs cadavres dénudés sont jetés dans la Seine pour les plus chanceux, émasculés et vandalisés pour d'autres. Les quelques esprits raisonnés qui osent appeler à un réveil des consciences prennent le risque de se faire assassiner. Mais qu'on ne s'y trompe pas : le déchainement de violence est un tel raz-de-marée que certains étrangers, comme les italiens, sont également éliminés sans autre forme de procès.
Face à une telle sauvagerie hystérique qui élimine tout sur son passage, le roi ordonne en vain l’arrêt du massacre plus tard dans la journée mais c'est déjà trop tard. Essayant de faire preuve d'une autorité qu'on ne lui connaissait pas, il exige que soient prises différentes mesures pour rétablir l'ordre et tente en vain de protéger certains en envoyant notamment le duc de Guise et le duc de Nevers protéger les protestants bénéficiant d’un statut ou d’un rang particulier. Ainsi, les protestants qui avaient trouvé refuge dans l’hôtel de l’ambassadeur d’Angleterre Francis Walsingham sont sauvés du siège qui menaçait de prospérer dans l'après-midi. D’autres sont réfugiés à l’hôtel de Guise et à l'hôtel de Nemours, où la grand-tante protestante du roi, Renée de France, s'est réfugiée avec une partie de sa maison. Les familiers de la famille royale comme les Crussol, Antoine et Louise, sont protégés et les princes et les princesses de sang trouvent un abri sûr derrière les murs du Louvre. Le chaos est total e le roi, croyant d'abord avoir sauvé sa tête, se demande si le moyen n'est pas pire que la menace ... les trompes royales ne parvenant pas à faire cesser les exactions.
En attendant, ce sont près de 3.000 personnes qui sont mortes depuis que le conseil du roi étroit a décidé de frapper, c'est 10% de la population des protestants vivant à Paris. Oui mais voilà, ramener le calme dans Paris ne suffira pas parce que le problème n'est pas seulement parisien. En basculant dans une telle justice d'exception, Charles IX a ouvert les vannes et donné le signal, le tocsin ayant été finalement entendu au delà des fortifications parisiennes. Clairement, il n'y aura pas que la Seine qui va rougir.
A suivre
Via une vie de tto https://ift.tt/2ReeQEb
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire